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nègre

Définition, traduction, prononciation, anagramme et synonyme sur le dictionnaire libre Wiktionnaire.
Voir aussi : Nègre, negre
  • (1529) Emprunt à l’espagnol negro (« noir, personne de couleur noire »)[1], du latin niger (« noir »)
  • (1704) « noir employé comme esclave »
  • (1757)[2] « écrivain dont les ouvrages sont signés par un autre »
  • (1759) emploi adjectival « de race noire »
  • (1812) « travailleur acharné ou exploité » travailler comme un nègre
  • (1857) « créole, mauvais français » parler nègre, petit nègre
  • (1922) « africain » art nègre.
Singulier Pluriel
nègre nègres
\nɛɡʁ\

nègre \nɛɡʁ\ masculin (pour une femme, on dit : négresse) (Hispanisme)

  1. (Esclavagisme) (Emploi à manier avec précaution) Esclave noir.
    • Le morceau d’or le plus grand qui ait été trouvé au Choco, pesait vingt-cinq livres. Le nègre qui en fit la découverte, il y a quinze ans, n’obtint pas même sa liberté. Son maître offrit la pépite au cabinet du roi, […]. — (Alexander von Humboldt, Essai politique sur le royaume de la Nouvelle-Espagne, Livre 4, chapitre 11, 2e édition, Paris : chez Jules Renouard, 1827, volume 3, page 390)
    • Être nègre !
      Oh ! comme j’ai désiré longtemps être nègre !
      D’abord, les négresses aiment leurs petits. — J’aurais eu une mère aimante.
      Puis quand la journée est finie, ils font des paniers pour s’amuser, ils tressent des lianes, cisèlent du coco, et ils dansent en rond !
      Zizi, bamboula ! Dansez Canada !
      Ah ! oui ! j’aurais bien voulu être nègre. Je ne le suis pas, je n’ai pas de veine !
      — (Jules Vallès, L’Enfant, G. Charpentier, 1889)
    • La forme de l’esclavage était celle de l’esclavage domestique et le sort des esclaves était certainement moins dur que celui des nègres qui travaillaient dans les plantations d’Amérique ou même les coolies chinois ou canaques qui les ont remplacés. — (Frédéric Weisgerber, Au seuil du Maroc Moderne, Institut des Hautes Études Marocaines, Rabat : Les éditions de la porte, 1947, page 34)
    • — Jusqu’à présent et dans ces pays-ci, toute femme est un Nègre.
      — Il y a d’honnêtes femmes.
      — Ce sont les
      bons Nègres.
      — Je suis pour la révolte des
      bons Nègres, dit Cordélia.
      — Un bon sujet pour le théâtre, dis-je : le colon qui s’aperçoit, dans le moment même où éclate la rébellion, qu’il n’y a plus de
      bons Nègres.
      — J’espère que ce seront les plus féroces, dit Cordélia.
      — Pour que la pièce soit bonne, dis-je, il faudrait que le colon comprenne pourquoi ce sont nécessairement les
      bons Nègres qui deviennent les plus féroces… — (Roger Vailland, 325.000 francs, 1954, réédition Le Livre de Poche, page 133)
    • « Oh non. Mais ces nègres… Ils ont des pieds à la place des mains.
      — Et des mains à la place des pieds… Comme tous les singes madame. »
      — (Case départ, 2011)
  2. (Anthropologie, Histoire) (Injurieux) (Péjoratif) (Vieilli) ou (Vulgaire) Homme à la peau noire, généralement afrodescendant. Note : Entre la majuscule initiale et la minuscule initiale, l’usage hésite et il n'y a pas de norme incontestée. Note : Ce terme était neutre et non injurieux au XVIIe siècle[3].
    • Il n’y a pas de nègres hors de la zone torride, et il est constant que plus on s’éloigne de cette région, où le soleil envoie ses rayons presque perpendiculairement, et plus le teint devient de moins en moins noir. — (Jean Déhès, Essai sur l’amélioration des races chevalines de la France, École impériale vétérinaire de Toulouse, Thèse de médecine vétérinaire, 1868)
    • Plus loin, Marx nous fait voir comment l’aurore des temps modernes fut marquée par la conquête de l’Amérique, l’esclavage des nègres et les guerres coloniales. — (Georges Sorel, Réflexions sur la violence, Chap. V, La grève générale politique, 1908, page 243)
    • Dans les rues se croisaient des Panamanéens bronzés de pure descendance espagnole, des nègres de la Jamaïque, de pittoresques Mexicains avec leur immense sombreros de paille multicolore. — (Alain Gerbault, À la poursuite du soleil; tome 1 : De New-York à Tahiti, 1929)
    • Le long des boutiques éclairées, des ombres se succédaient sans hâte. Il y avait des nègres, quelques Chinois, des blancs. Tous reluquaient les filles. — (Francis Carco, Brumes, Éditions Albin Michel, Paris, 1935, page 41)
    • Tout sentiment d’honneur et d’humanité est inconnu à ces barbares… Point de raisonnement chez les nègres, point d’esprit, point d’aptitude à aucune sorte d’étude abstraite… Leur naturel est pervers… — (Jacques-Philibert Rousselot de Surgy Histoire générale des voyages, 1765)
    • Le mot “'nègre”, il va dans n’importe quelle bouche ». (…). Dans la bouche d’un Blanc, n’importe qui peut l’employer. On sait quand on est insulté, quand quelqu’un utilise un mot pour vous humilier et pour vous écraser. Et puis, on sait aussi quand c’est un autre emploi. Vous l’employez, vous en subissez les conséquences. — (Steve E. Fortin, « Le mot “nègre”, il va dans n’importe quelle bouche », Le journal de Montréal, 19 octobre 2020) Note : La citation est de l’académicien Dany Laferrière, Canadien d’origine haïtienne.
  3. Écrivain payé pour écrire un livre pour une personne qui le signe de son nom.
  4. (Littérature) (Par extension) Spécialiste de l’écriture qui, dans l’ombre, révise abondamment ou réécrit des textes d’auteur pour les maisons d’édition.
    • Elle me recommanda chaleureusement à Pierre Lazareff et Charles Gombault, et je fus engagé sans difficulté comme « nègre » ou encore « rewriter » dans le groupe Lazareff, la presse populaire et à grand tirage de l’époque. — (Claude Lanzmann, Le Lièvre de Patagonie, Gallimard, 2009, chapitre X)
    • Je commence aussi à comprendre que, sur des airs de collaboration, je supplée aux lacunes des auteurs officiels, ce qui revient à dire que je fais « un travail de nègre ». Il semble que l’expression « prête-plume », plus convenable, pourrait remplacer celle de « nègre littéraire », mais elle n'apporte pas plus de droits d’auteur et de reconnaissance. — (Ginette Duphily, Mon ami Pierrot, Linguatech éditeur, Montréal, 2016, page 80)
  5. Meilleur élève d’une promotion militaire.
  6. Blanc travesti en Noir.
    • De même nous n’étions pas de force contre les bandes de musiciens nègres qui courent les rues et que les Anglais appellent des nigger-melodits ; ces faux nègres qui s’accoutrent grotesquement avec des habits à queue de morue et d’immenses cols dans lesquels leur tête est enveloppée comme un bouquet dans une feuille de papier, étaient notre terreur plus encore que les bardes écossais : aussitôt que nous les voyions arriver, ou simplement quand nous entendions leurs banjo, nous nous taisions respectueusement et nous nous en allions loin de là dans un quartier où nous espérions ne pas rencontrer une autre de leurs bandes ; ou bien nous attendions, en les regardant, qu’ils eussent fini leur charivari. — (Hector Malot, Sans famille, 1878)

Apparentés étymologiques

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Singulier Pluriel
Masculin
et féminin
nègre nègres
\nɛɡʁ\

nègre \nɛɡʁ\ masculin et féminin identiques (Hispanisme)

  1. Synonyme de noir (l'adjectif et la couleur). Le mot était encore en usage à la campagne dans certaines régions de France jusque vers 1980.
    • Il fait nègre ou ner , pour il fait noir. «À qui est tielle vache nègre ?» (à qui est cette vache noire?) — (Léopold Favre, Glossaire du Poitou, de la Saintonge et de l'Aunis, Éd. Robin et Favre, 1867)
    • J'm'en d'venais, garochant des chails et cimant les âbres, en seguant la palisse d'épines bianches et d'épines nègres, [...]. — (Roger Soulard, Aneut chez d'aut'foués, éd. Aguiaine, Le Subiet, 1983.)
  2. Relatif aux nègres ou aux arts africains
    • Quatre chevaux splendides, tout sellés et bridés, marchent aux deux côtés de la route, tenus en main par des palefreniers nègres. — (Frédéric Weisgerber, Trois mois de campagne au Maroc : étude géographique de la région parcourue, Paris : Ernest Leroux, 1904, page 118)
    • Elles passent leur après-midi à se perdre dans les bois aux bras de leurs cousins, à se baigner avec l'employé nègre de la sous-préfecture, à lire, étendues dans les prairies, le marquis de Sade illustré… — (Jean Giraudoux, Intermezzo, 1933, acte I, scène 3)
    • Un écriteau portait les mots : "Tribunal indigène". Autour, la foule nègre stationnait. — (Georges Simenon, Le Blanc à lunettes, chapitre VI, Gallimard, 1937)
    • Ce fut alors la période où je passai la plupart de mes nuits à Montmartre, traînant les boîtes telles que le Zelli’s et affectionnant par-dessus tout les endroits nègres. — (Michel Leiris, L’âge d’homme, 1939, réédition Folio, page 188)
    • Léo, qui préparait un film sur la grande démocratie rwandaise, financé conjointement par le Canada et le parti du président, se promenait de table en table, distribuant sourires et mensonges comme un Maurice Chevalier nègre dans une mauvaise comédie musicale. — (Gil Courtemanche, Un dimanche à la piscine à Kigali, 2000, réédition 2002 éditions Boréal, page 191)

Prononciation

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Références

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  1. « « Nègre », ce mot lourd du racisme et des crimes qui l’ont forgé », dans Le Monde, 2021-01-22 [texte intégral]. Consulté le 2021-01-24
  2. Alain Rey, Dictionnaire historique de la langue française, Dictionnaires Le Robert.
  3. Sophie Piron, « Le dérèglement linguistique à l'ère de l'Université numérique », Argument, vol. xxiv, no 1, automne-hiver 2021-2022, p. 86.