Utilisateur:Budelberger/Balzac
Apparence
- C’est à P. L. Jacob, bibliophile, c’est à ce digne et excellent
- homme, c’est à cette espèce de mouleur en cire, qui passe sa vie
- à guetter une syllabe, un fait, qui prend les empreintes de toutes
- les faces héroïques des vieux siècles ; c’est à ce modèle des anti-
- quaires, qui voudrait mettre sous verre toute une époque, comme
- on y met des capitales, qui se plaint de la petitesse des médailles,
- et souhaite vingt fois par jour un Carporama de faits historiques ;
- c’est à ce consciencieux et modeste auteur, l’ami de tous ceux qui
- le connaissent ; c’est à ce Vaucanson littéraire que nous devons
- les Deux Fous !… Que nous reste-t-il à dire, après la peinture de
- l’homme ? que les Deux Fous sont un drame, un portrait très-exact
- de la cour de François Ier ?… Tarare ! à quoi cela servirait-il? Com-
- ment rendre compte d’un livre où les personnages du temps
- parlent, marchent, agissent, soupent, se couchent, dorment,
- comme ils ont parlé, marché, agi, soupe, dormi, etc. ? Lire ce livre,
- c’est vivre dans le xvie siècle, et nous le comparerions volontiers
- au cabinet de Curtius, dont, par un coup de baguette, les figures
- auraient reçu, pour un jour, la vie et le mouvement. En effet, cette
- composition tient de la peinture, de la sculpture, du drame et de
- la magie. C’est un sièclorama.
— (Honoré de Balzac, Portraits et critique littéraire : Le Bibliophile Jacob, 1830, in Œuvres complètes, tome XXII, Calmann Lévy, Paris, 1879, p. 163-164)